Le blog d' André Murawski

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LA PRIMAIRE DE LA DROITE ET DU CENTRE S'INSCRIT A L'INVERSE DES VALEURS DE LA REPUBLIQUE

Suivant l’exemple initié en 2012 par le parti socialiste et le parti radical de gauche, la direction des Républicains a décidé d’organiser des primaires ouvertes en vue de désigner un candidat à l’élection présidentielle des 23 avril et 7 mai 2017.

Outre la forte concurrence des ambitions que ce choix révèle, la mise en œuvre de ces primaires porte atteinte à plusieurs principes de la République et de la démocratie.

En effet, ces primaires posent d’abord un problème de constitutionnalité. Elles battent ensuite en brèche le droit au secret des opinions. Pour faire bonne mesure, elles confortent l’existence d’une forme de participation financière obligatoire au suffrage. Enfin, elles induisent des coûts que les collectivités locales n’ont pas vocation à supporter.

Selon l’article 3 de la Constitution, « le suffrage est toujours universel, égal et secret. Sont électeurs, dans les conditions déterminées par la loi, tous les nationaux français majeurs des deux sexes, jouissant de leurs droits civils et politiques. » Il découle de cet article que l’élection du Président au suffrage universel direct est un des fondements de la Ve République.

Or, les primaires reviennent à empêcher le Peuple de faire son choix parmi TOUS les candidats potentiels puisqu’elles visent précisément à écarter un certain nombre de personnes de la candidature au profit d’une seule. D’autre part, les questions d’organisation appellent de multiples interrogations : Sur quels critères les pseudo électeurs sont-ils autorisés à voter ou, au contraire, écartés du vote ? Quelles sont les modalités de convocation d’un corps électoral par définition indéterminé ? Comment la neutralité des présidents des bureaux de vote et des assesseurs est-elle garantie ? Quelles contestations peuvent-elles être exercées en dehors de toute juridiction ?

On voit que les primaires, ouvertes à un corps intermédiaire et mal défini, limitent le choix des votants à des candidats prédéterminés, et constituent de fait une élection à deux degrés en rupture totale avec l’esprit, sinon avec la lettre, de la Constitution qui reste muette, et pour cause, sur ce procédé.


Les primaires battent également en brèche un principe fondamental de toute élection en droit  français : le secret du suffrage.

Le pluralisme des candidatures semble infirmer l’idée selon laquelle la validité du suffrage pourrait être contestée. Les opérations électorales semblent pouvoir se dérouler dans des conditions « normales ». Mais la Charte élaborée par les organisateurs fait substantiellement obstacle au secret du vote dans le cas des primaires.

Cette Charte ne laisse en effet place à aucun doute. L’article 1er précise que la désignation du candidat soutenu par le parti « les Républicains » est ouverte à « l’ensemble des citoyens partageant les valeurs républicaines de la droite et du centre et s’engageant pour l’alternance. »

Ce texte ne laisse aucune place à l’interprétation. Pour voter, il faut partager les valeurs de la droite et du centre et donc, a contrario, ne pas adhérer aux valeurs, fussent-elles républicaines, des autres partis de l’échiquier politique. Les rédacteurs sont même allés au-delà puisqu’il est demandé aux « votants » de s’engager pour l’alternance. Autrement dit, il est demandé aux participants de dévoiler leurs opinions politiques ce qui pourrait se concevoir dans le cadre fermé d’une association, mais ce qui devient inacceptable dans le contexte d’une consultation « ouverte ».

C’est donc la liberté d’opinion, en ce que chacun est libre d’exprimer, mais aussi de ne pas exprimer ses convictions, qui est en cause dans ce type de consultation. Comment ne pas soupçonner alors, sinon la constitution de fichiers, du moins l’identification de certains citoyens par les responsables d’un parti politique sur le plan local ?

Bien entendu, le fait que des personnes issues d’autres partis et donc, pas forcément favorables à « l’alternance » aient été autorisées à voter constitue une autre irrégularité formelle : la violation de la Charte pratiquée avec l’assentiment des organisateurs.

Autre difficulté : la question d’une participation financière obligatoire des « votants ». Le 2e alinea de l’article 2 de la Charte prévoit que le vote est subordonné « au versement d’une contribution de deux (2) euros par tour de scrutin. » Or, les dispositions de l’article 3 de la Constitution, selon lesquelles le suffrage est universel, s’opposent par définition à toute possibilité de participation financière car l’universalité entraîne de facto la gratuité. On imagine mal en effet à quel titre un citoyen pourrait être privé du droit de vote au seul motif qu’il ne pourrait pas acquitter des « droits » fixés en dehors de la loi.

C’est à l’expression de la volonté populaire et, donc, de la volonté générale que le principe d’un suffrage sous condition de contribution contrevient. En ce sens, il est clair que les primaires enfreignent le caractère démocratique de la République. Sans doute certains objecteront-ils que le montant de la contribution est minime. Il n’empêche que le versement d’une contribution, même symbolique, fait que le vote n’est pas gratuit et donc qu’il n’est pas universel.

Enfin, il y a lieu de s’interroger quant aux charges induites par l’organisation des primaires. La Charte indique que les candidats disposeront de comptes de campagne. Pour autant, la fiche n° 3 figurant dans le Guide électoral de la primaire, relative aux dépenses de campagne, se borne à évoquer des frais de « permanence et locaux », et ne mentionne pas explicitement les charges de mise à disposition des salles communales ou intercommunales utilisées pour les opérations de vote.

Dès lors, il y a également lieu de s’interroger sur les conditions de mise à disposition de locaux destinés à accueillir les bureaux de vote. Les frais de fonctionnement tels que l’éclairage, le chauffage, la mise à disposition même limitée de personnel de permanence seront-ils répartis entre les comptes de campagne des candidats ? Ou seront-ils supportés par le contribuable en cas de mise à disposition sans contrepartie financière ?

L’organisation de primaires ouvertes met donc en évidence de nombreux problèmes juridiques, mais aussi financiers et moraux. Car c’est bien de moralité publique qu’il s’agit lorsque les principes démocratiques fondamentaux qui ont fait la République française sont écartés au profit de primaires dont la conséquence évidente est d’empêcher la réalisation du dessein du fondateur de la Ve République : faire que l’élection présidentielle soit, d’abord, la rencontre d’un homme et d’une Nation.

André MURAWSKI – 21 novembre 2016
Conseiller régional (FN-RBM) Hauts-deFrance
Conseiller municipal d’Ostricourt



22/11/2016
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